En Haute-Marne, sur une exploitation céréalière de 270 hectares, Jean-Philippe Frossard incarne une nouvelle génération d’agriculteurs engagés dans la transition écologique.Associé à deux confrères au sein du collectif Agrinov, il s’est lancé depuis 2020 dans un projet agrivoltaïque ambitieux, destiné à diversifier son activité agricole par la réintroduction de l’élevage ovin tout en valorisant des terres à faible potentiel.
Une exploitation en mutation
Installé en zone intermédiaire, Jean-Philippe gère une exploitation de grande culture avec deux associés. Ensemble, ils cultivent environ 1000 hectares et ont également fondé une entreprise de travaux agricoles. Mais les rendements deviennent de plus en plus aléatoires. « Nous sommes très exposés aux aléas climatiques, notamment à des sécheresses de plus en plus fréquentes. Cela fragilise nos terres à faible potentiel et met en lumière les limites d’un système 100 % grandes cultures », explique-t-il. Cette situation les pousse à réfléchir à une nouvelle trajectoire pour l’exploitation.
L’agrivoltaïsme, levier pour relancer l’élevage
Pour Jean-Philippe et ses 4 associés dans le projet Ô Pâturages, la réponse passe par une diversification du système. Sur plusieurs hectares de terres peu productives, ils imaginent la création d’un pâturage pérenne, mutualisé, sur lequel serait installé un atelier ovin. « On a vu dans l’agrivoltaïsme une opportunité unique : reconvertir des terres cultivées peu productives en prairies permanentes, y installer une bergerie et un atelier ovin, tout en produisant de l’électricité propre, abondante et parmi les coûts de production les plus bas », raconte-t-il.

Le projet permettra aussi de faciliter l’installation d’un jeune éleveur déjà actif sur le territoire. « C’est aussi un projet humain. Permettre à un jeune de s’installer, c’est redonner du sens à notre métier en soutenant la filière ovine du département »
Une aventure collective avec GLHD
Le projet se structure avec le développeur GLHD, qui propose une approche centrée sur l’activité agricole. « Ce qui nous a plu, c’est leur approche centrée sur le projet agricole. Il ne s’agissait pas d’imposer un modèle, mais de construire ensemble un projet de territoire viable, sans dépendre des soutiens publics», souligne Jean-Philippe. La transparence, l’écoute, la concertation continue et le travail sur mesure élaboré par le développeur ont permis de bâtir un projet cohérent, intégré au tissu local. L’appui des élus locaux et des collectivités s’est aussi révélé essentiel. « On a tout de suite senti que le projet parlait au territoire », ajoute-t-il.
Une stratégie gagnant-gagnant
Les bénéfices attendus sont nombreux : retour de l’élevage, diversification des revenus, valorisation de terres les moins productives. « Ramener de l’élevage, c’est aussi redonner une autonomie au système, agronomique et économique », insiste Jean-Philippe. La bergerie, construite en commun et dotée d’une toiture photovoltaïque, constitue un outil stratégique que les agriculteurs n’auraient « jamais pu financer seuls ». Le projet ambitionne également de restaurer une dynamique locale autour d’un élevage autonome, nourri sur des prairies naturelles permanentes qui se substituent aux grandes cultures au service de la biodiversité. Une vision durable qui dépasse la simple logique de rendement.
Conseils pour se lancer
Pour Jean-Philippe, un tel projet « ne s’improvise pas ». Il insiste sur la nécessité d’une vision de long terme. « C’est un projet d’aménagement du territoire, pas seulement un projet agricole. Il faut s’y engager pleinement, accepter le temps long, les échanges avec l’administration, et surtout, penser le projet énergétique au service du projet agricole — jamais l’inverse. » L’une des clés du succès, selon lui, a été le travail de concertation mené dès les premières étapes. « Cette démarche a permis d’intégrer des attentes concrètes, d’ajuster certaines implantations, et d’améliorer sensiblement la qualité du projet final. Elle a aussi renforcé l’adhésion locale et le dialogue avec les acteurs publics comme privés ».
Une approche rigoureuse et partagée, qui donne à ce projet les fondations solides d’une réussite collective.